Fonctions modulaires
Cette page vient compléter plusieurs points
évoqués à divers endroits sur la page
Homographies,
et présenter un dernier type de fonctions : les fonctions modulaires.
Pour voir plus de détails mathématiques, vous êtes au mauvais endroit...
Le mieux est probablement de prendre un bouquin, il y en a un de
J.P. Serre et un de
R. Godement (et certainement beaucoup d'autres !) qui sont bien expliqués.
En fin de page (
partie 4), il y a quelques explications et une illustration sur le groupe modulaire.
1) Séries d'Eisenstein
Les fonctions modulaires les
plus simples à tracer et les plus immédiates à introduire sont les
séries d'Eisenstein : on les
appelle Gk ou Ek ou E2k... Ce sont des formes modulaires de poids 2k
(c'est difficile à distinguer sur dessin) :
Fonction G2
tracée sur [-2,2] + i [0,2] :
Pour la définir formellement, bon courage... Elle est
1-périodique (comme toutes les fonctions modulaires) et cela permet de
la représenter dans le disque
D(0,1) avec le changement de variable
et on regarde la fonction comme une fonction de q.
Fonction G2 : sur [ -1.1 , 1.1 ] + i [ -1.1 , 1.1 ] :
Avec quelques problèmes de convergence sur le bord du disque
: la
véritable fonction est plus lisse que ça mais je n'ai pas pu la tracer
plus précisément, faute de moyens informatiques. On remarque tout de
même que la fonction est holomorphe à l'infini (le centre du disque) et
réelle sur les axes verticaux portés par 1/2 et 1... Les images sont
très claires (et un peu assombries artificiellement, je l'avoue) car
les valeurs sont assez grandes en module un peu partout.
Le changement de variable est mieux expliqué plus bas sur cette page (en
partie 3)
On peut aussi tracer la
fonction G3 des deux
mêmes façons :
Et sur le disque après le changement de variable :
Cette fonction est de poids
6. On pourrait
croire qu'elle s'annule à l'infini mais non, ni aucune des séries
d'Eisenstein.
2) Delta et J
La fonction
s'exprime comme un produit infini de la variable
:
On le
multiplie encore par une constante dans certains cas. On l'appelle aussi le discriminant.
La fonction
Discriminant
modulaire sur le rectangle [-2,2] + i [0,2] :
Et à nouveau, pour voir sa dégaine à l'infini, on peut regarder ce que
donne la fonction sur le disque :
Là par exemple on peut voir que c'est une forme
parabolique, elle s'annule à l'infini (au milieu du disque). Il s'agit
d'une fonction modulaire de poids 12, qui peut s'exprimer (avec les
bonnes constantes multiplicatives)
. Sans entrer dans les détails, on peut utiliser la
fonction
de
Weierstrass pour prouver qu'elle ne s'annule pas sur , puis définir J ainsi :
(avec des constantes et les bonnes définitions
pour les
séries d'Eisenstein). La fonction J a une propriété sympa :
elle
est de poids 0, donc l'image d'un point ne dépend que de son orbite
sous l'action de
.
Pour toute homographie
h de
, pour tout
z
dans
,
J(h(z))=J(z)
La
fonction J dessinée sur [-2,2] + i [-2,2]:
En regardant très attentivement on peut
reconnaître les
domaines fondamentaux les plus balaises (voir
partie 4) dans la distribution des valeurs de
J. Cela traduit le fait qu'elle est invariante par composition avec une
homographie.
Pour l'observer à l'infini, on plie les domaines
fondamentaux :
En théorie, celle ci a un pôle à l'infini, bien qu'il ne soit
pas
visible sur mon dessin. Donc ce n'est pas une fonction modulaire, mais
presque. Les sommes des séries d'Eisenstein sont difficiles à exprimer
informatiquement.
Si un éventuel lecteur a une suggestion pour tracer efficacement
ces fonctions (sans passer par les séries), je suis preneur. Mon
adresse mail est
, merci d'avance !
Et pour finir un dessin perturbant sorti d'une tentative de tracer J,
que j'ai appelé
le
cri modulaire :
La suite ne contient presque pas d'illlustration et explique quelques points mathématiques sur ces fonctions.
3) Le changement de variables Ce
changement
de variable envoie le demi-plan de Poincarré vers
D(0,1),
mais il n'est
injectif que sur les demi-bandes verticales d'épaisseur 1. Il ne
s'agit donc pas d'un changement de variable holomorphe de
vers
D(0,1) !
En fait, il réalise une bijection holomorphe de
vers
,
et zéro devient le point à l'infini. Si on représente une fonction de
quelconque dans le disque unité, elle aura souvent un
segment de discontinuité sur le disque (le segment [0,1]).
Il faut s'assurer que
la fonction qu'on représente est 1-périodique (ce qui est le cas pour
les fonctions
modulaires) et alors on peut la représenter dans le disque sans perdre
d'information. Mieux : on gagne de l'information sur le comportement en
0 dans le disque, et c'est ainsi qu'on définit une autre propriété que
doit nécessairement vérifier une fonction modulaire :
être holomorphe à l'infini.
Cette propriété a peu de sens dans
mais elle en a dans
D(0,1).
Finalement, dans le disque, l'infini est le centre du cercle 0.
0 correspond au point 1 le plus à droite du cercle
1/2 correspond au point -1 le plus à gauche du cercle
1 correspond au point 1 du cercle
Le même point 1 du cercle décrit 0, 1, 2, -1.. Il décrit tout
, ce qui traduit la bijection avec le quotient
.
Si Bob veut imaginer l'allure de ce changement de variable (à méditer profondément, avec un stylo si possible) :
- on part d'une demi bande infinie
{ z , 0<Re(z)<1 , Im(z)>0} d'épaisseur 1, vers le haut
- on colle les deux bords infinis (c'est le quotient par
) pour se retrouver avec
demi-cylindre infini - on écrase le cylindre pour que son rayon soit
exp(-y) : il est de plus en plus fin en approchant de l'infini (quand on monte)
- on le regarde d'au dessus : on voit le disque épointé
(un peu comme si on l'aplatissait sur le plan)
- le point 0 est alors le
point à l'infini de la bande de départ
Je sais pas si c'était très clair, voici un petit dessin si ça peut aider :
4) Le groupe modulaire
Le demi plan de Poincarré est l'ensemble
défini par
. C'est le demi plan
supérieur.
Sur
il existe une action du groupe
(l'ensemble des
matrices 2x2 de déterminant positif) qui agit par
g : . Cette action se
restreint à celle de
car c'est un sous groupe. L'action de -Id est triviale car
, donc finalement
c'est
qui
agit sur
, de
façon fidèle, et hautement non transitive. On
note ce groupe
,
et on l'appelle le groupe modulaire !
On peut d'abord prouver plusieurs choses :
et
sont dans le groupe
modulaire. De plus ce sont des générateurs de
.
Enfin on peut montrer que ST est d'ordre 3, S est d'ordre 2,
et
décrire ainsi mieux la façon dont S et ST engendrent le groupe (voir l'illustration sur la figure suivante).
La recherche de domaines fondamentaux revient à chercher un ensemble
contenant exactement un représentant de chaque orbite. Il en existe un pas trop compliqué
:
On peut illustrer
en le voyant comme un ensemble de domaines fondamentaux : sur [ -1.6 , 1.6 ] + i [ 0 , 3.2 ]
est le domaine noté Id : en fait le domaine
u désigne
u(). On voit que
est envoyé sur le domaine en dessous de lui par la symétrie S. La
translation T décale le domaine sur la droite, et ST lui fait faire une
rotation autou du point
j=exp(2i/3).
Pour
Bob, si ça va un peut vite, en plein milieu, tout en bas c'est le point
0. À sa verticale, entre les domaines notés Id et S, il y a
i.
Un plan plus large des domaines fondamentaux est disponible à
la page
Homographies !
f
est modulaire de poids k signifie
, pour toute
application de
,
et pour tout complexe de
. Il faut aussi que la fonction soit holomorphe à l'infini.
Cette deuxième condition signifie
f est holomorphe en 0 après le changement de variables
On remarque tout de suite que
f(z+1)=f(z)
donc les
fonctions modulaires sont 1-périodiques.